R.A.P. a pour vocation de faire connaître les diverses
approches de la lutte antipublicitaire
sans pour autant adhérer à toutes les opinions et idées
d'actions formulées, dont elle laisse la responsabilité à
leurs auteurs.
Introduction :
Bonjour à tous,
Le mois de novembre est marqué par une des plus grande dates de la lutte
contre la publicité et la surconsommation. R.A.P. se fait évidemment
l'écho de ce rendez-vous du 24 novembre qu'est la journée sans
achat, notamment par ce numéro de R.A.P.-à-Toile. Nous avons donc
consacré une grande partie de ces colonnes à cette action d'envergure.
Après l'envoi, avec R.A.P.-Échos, du texte du spectacle écrit
par Casseurs de pub, nous avons reçu des réactions de lecteurs
qui ont vu dans ces écrits une vulgaire remise en cause de la religion
catholique. Nos intentions ayant apparemment été mal interprétées,
nous avons cru bon d'expliquer que ce pastiche de messe inventé par des
animateurs de Casseurs de pub n'est en aucune façon antichrétien.
Nous avons reproduit le texte en question (non pas pour relancer la polémique
mais pour le porter à la connaissance de ceux qui ne sont pas abonnés
à R.A.P.-Échos) suivi d'une mise au point de François Brune
intitulée « Christianisme et publicité ».
Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter une bonne lecture et une bonne
journée sans achat.
Comme chaque année depuis trois ans, R.A.P. (Résistance à
l'agression publicitaire) et Casseurs de pub relaient La journée sans
achat en France le 24 novembre 2001.
Lancée par Adbusters, association canadienne qui édite la revue
du même nom, « La journée sans achat » nous invite
à arrêter de consommer pendant 24 heures.
24 heures pour dénoncer le pillage de notre planète :
20% de la population du globe consomme 80% des ressources planétaires.
24 heures pour réfléchir aux conséquences de la publicité
:
R.A.P. et Casseurs de pub organisent un colloque à 14 h
Grande salle de l'AGECA, 177, rue de charonne, 75011 Paris (Métro : Alexandre
Dumas) sur le thème
LA PUBLICITÉ : NOUVEAU VISAGE DU TOTALITARISME ?
Avec :
- Florence Amalou, journaliste au Monde et auteur d'un ouvrage critique sur
la publicité : Le livre Noir de la pub
- Frédéric Beigbeder, journaliste, écrivain, auteur de
99 Francs
- Gérard Biard*, journaliste à Charlie Hebdo
- François Brune, universitaire, collaborateur du Monde Diplomatique,
auteur de (entre autre) Le bonheur conforme, essai sur la normalisation publicitaire.
- Pierre-Jean Delahousse, président de l'association Paysages de France
- Dominique Quessada*, publicitaire, philosophe, auteur de La société
de consommation de soi.
* sous réserve
24 heures pour organiser des actions humoristiques :
- À Paris : spectacle et distribution de bons de non-achat à 17
h devant le 77, avenue Philippe Auguste, 75011 Paris (Métro : Alexandre
Dumas ou Charonne)
- À Vichy : action R.A.P.-Auvergne. Distribution de bons de non-achats
à 14 h 30 allée des Ailes, devant le supermarché du Pont
Barrage. Renseignements : 04 70 58 08 62
- À Clermont-Ferrand : une distribution de bons de non-achat est envisagée.
Renseignements : Cyril.Ronfort at
ifrance.com
- En Belgique : à l'occasion de cette journée, le Réseau
Éco consommation a mis en place une campagne d'information "Résister
à la publicité: comment ? Pourquoi ?"sur son site http://www.ecoconso.org
- L'association Chiche nous fait aussi savoir qu'elle organisera des actions
en France :
Dijon : JEUDI à 17h 30 devant les galeries lafayettes pour un tractage
et animations théatrales (renseignements : Alexis 06 13 06 90 04 chiche-dijon
at netcourrier.com)
Bordeaux : samedi à 14 h devant les galeries lafayettes pour un tractage
(renseignements : Aude 05 56 94 67 20)
Toulouse : samedi à partir de 14h30, rue St Rome (renseignements : Aurélien
06-20-31-31-43 chichetoulouse at
bigfoot.com)
Paris : samedi 11h fontaine des innocents, près des Halles (renseignements
: Thierry : 06 87 35 60 19)
Ce samedi 24 novembre 2001, c'est aussi la collecte nationale des Banques alimentaires.
Alors, n'achetons rien, mais donnons des denrées non périssables
aux bénévoles qui participent à la collecte.
Site de la Banque alimentaire : http://www.banquealimentaire.org
Vous ne serez pas à Paris le samedi 24 novembre ? Ce n'est pas grave.
Voici le texte du
spectacle écrit par Casseurs de pub. Prenez votre ami le plus cabot.
Revêtez-le d'une robe blanche. En route pour le supermarché le
plus proche, et vous voilà parés pour une action festive et comique
pour la Journée sans achat. :
Prêtre : P - Spectateurs : S
1. Entrée
Le prêtre accueille les fidèles en souriant.
P : Mes très chers frères, mes très chères soeurs,
le Grand Capital nous a réunis aujourd'hui pour louer son nom. Je suis
heureux de nous voir toujours plus nombreux au temple de la consommation et
de voir tant de pays se rallier à notre cause. Chaque jour, plus de fidèles
viennent admirer la gloire du Grand Capital pour le bonheur de tous et la
croissance éternelle. Je suis heureux de voir des enfants parmi nous...
Venez plus près, les enfants...
Je suis heureux de voir que la foi les touche de plus en plus jeunes, qu'ils
comprennent de plus en plus tôt que le Grand Capital et la croissance
sont les buts ultimes de nos vies.
P : Levons les bras bien haut, mes frères, afin d'acclamer la gloire
du Grand Capital.
Le prêtre lève les bras très hauts et les spectateurs l'imitent.
Il prend un air grave.
P : Gloire à toi, ô Grand Capital.
S : Gloire à toi, ô Grand Capital.
P : Nous te louons, nous te prions, nous t'adorons.
S : Nous te louons, nous te prions, nous t'adorons.
P : Donne-nous aujourd'hui la croissance éternelle.
S : Donne-nous aujourd'hui la croissance éternelle.
P+S : Amen
P : Au nom de la sainte trilogie : croissance, consommation et progrès,
nous t'implorons.
S : Au nom de la sainte trilogie : croissance, consommation et progrès,
nous t'implorons.
P : Donne-nous toutes les richesses du monde.
S : Donne-nous toutes les richesses du monde.
P : Nous te louons, nous te prions, nous t'adorons.
S : Nous te louons, nous te prions, nous t'adorons.
P : Prends pitié de nous, Grand Capital.
S : Prends pitié de nous, Grand Capital.
P+S : Amen
2. Confession des péchés
Temps de pause. Le prêtre regarde par terre, puis lève la tête
doucement et regarde tristement le public.
P : Je confesse au Grand Capital tout puissant, à saint Jean-Marie Messier,
à saint Bernard Arnaud, à tous les actionnaires, à saint
Louis Schweitzer et à saint Antoine Sellières, à vous,
mes frères, que j'ai beaucoup péché, par pensée
subversive, par parole démoralisatrice et par action contestataire.
(Le prêtre se frappe trois fois la poitrine.)
C'est ma faute, c'est ma faute, c'est ma très grande faute.
C'est pourquoi je supplie la bienheureuse croissance toujours vierge, saint
Laurent Fabius et saint Alain Minc, les apôtres Jean-Marc Sylvestre et
Jean-Pierre Gaillard, tous les saints et vous, mes frères, de prier pour
moi le Grand Capital, notre Dieu.
Que le Grand Capital tout puissant vous fasse miséricorde, qu'il vous
pardonne vos péchés et vous conduise à la croissance éternelle.
S : Amen
Différents témoins viennent confesser leurs péchés
au micro.
2.1. Premier témoin
Oui, Grand Capital, j'ai péché. En ces temps de guerre, je n'ai
pas fait preuve de patriotisme économique. Samedi dernier, j'ai préféré
aller me balader dans les champs plutôt que d'aller te louer au grand
temple de la consommation. Pardonne-moi, saint Michel-Edouard Leclerc, de ne
pas avoir participé à la croissance économique, et ainsi,
de mener le pays à la récession.
P : Que le Capital tout puissant me fasse miséricorde, qu'il me pardonne
mes péchés et qu'il me conduise à la croissance éternelle.
P : Tous ensemble, mes frères.
S+ P : Que le Grand Capital tout puissant me fasse miséricorde, qu'il
me pardonne mes péchés et qu'il me conduise à la croissance
éternelle.
2.2. Deuxième témoin
Oui, Grand Capital, j'ai péché. Je préfère rouler
à vélo plutôt que d'utiliser l'outil de liberté et
de bonheur qu'est l'automobile. Pardonne-moi, saint Jacques Calvet, d'avoir
mis en danger le fleuron de l'industrie française, les usines d'automobiles
et tous mes frères qui y travaillent.
P : Tous ensemble, mes frères.
S+ P : Que le Grand Capital tout puissant me fasse miséricorde, qu'il
me pardonne mes péchés et qu'il me conduise à la croissance
éternelle.
2.3. Troisième témoin
Oui, Grand Capital, j'ai péché. Je n'ai pas regardé la
télévision, mardi soir. Mon esprit s'est ainsi éloigné
du droit chemin pour se laisser aller à des pensées impies et
subversives.
Pardonne-moi, saint Hervé Bourges, d'avoir commis le crime de pensée
et d'avoir fragilisé l'unité de notre communauté de consommation.
S+ P : Que le Grand Capital tout puissant me fasse miséricorde, qu'il
me pardonne mes péchés et qu'il me conduise à la croissance
éternelle.
2.4. Quatrième témoin
Oui, Grand Capital, j'ai péché. Je suis allé en vacances
dans les Cévennes en train. J'ai refusé la superpromotion de Travel
On-Line qui m'offrait la possibilité de partir pour 1500 F dans un palace
au Bangladesh.
Pardonne-moi, saint Gilbert Trigano, d'avoir mis en danger le trafic aérien
et les clubs de vacances de touristes occidentaux qui permettent aux populations
affamées du tiers-monde de sortir du besoin.
S+ P : Que le Grand Capital tout puissant me fasse miséricorde, qu'il
me pardonne mes péchés et qu'il me conduise à la croissance
éternelle.
3. Sermon
Mes bien chers frères, mes bien chères soeurs, nous voici réunis
en ce troisième dimanche après l'ouverture du deuxième
marché du Palais Brognard. Aujourd'hui, mon coeur est en peine. J'apprends
que des hérétiques, parmi notre communauté, diffusent des
journaux subversifs et blasphématoires. Certains d'entre vous, parmi
cette assemblée même, en viendraient à contester le caractère
indépassable de le pensée lumineuse du Grand Capital. Qu'ils se
repentent !
Veulent-ils rejoindre dans l'obscurantisme ce faux prophète impie dénommé
Jésus-Christ, qui a subverti les foules pendant tant d'années
? Cet hérétique prêchait la pauvreté, la simplicité
et refusait la compétition à outrance. Rappelons comment il a
chassé les marchands du temple qui servait le Grand Capital notre seigneur.
Est-ce ainsi que nous participerons à la croissance et à la consommation
éternelle ? Comment le marché peut-il supporter de tels actes
qui mettent en cause son caractère sacré ? Parjure, vade retro
Satana Jésus-Christ, Dieu des pauvres, vil hippie.
Non, mes frères, ne nous laissons pas aller à ces pensées
qui sont une insulte à notre Dieu Capital. Ramenons ces brebis égarées
dans le droit chemin du Progrès. Le Grand Capital pardonne à ceux
qui reconnaissent leurs fautes. J'invite ceux d'entre vous qui doutent à
communier dans le supermarché le plus proche ou, à défaut,
chez leur concessionnaire
automobile. Que tous ceux d'entre vous qui voient un de leurs frères
ou l'une de leurs soeurs sous l'emprise du démon subversif le dénoncent
immédiatement. N'oubliez pas que c'est votre devoir d'aider les plus
faibles à rester dans la lumière du Capital et dans l'unité
de la sainte consommation.
Des esprits contestataires mettent en doute la pensée du Grand Capital.
Ainsi, certains ne croient plus à la sainte croissance. D'après
eux, une croissance économique infinie serait impossible sur une planète
où les ressources sont limitées. Hérésie ! Pardonne-leur,
Seigneur, ils ne savent pas ce qu'ils disent. D'autres osent insinuer qu'une
consommation
frénétique n'apporterait pas le bonheur, que la consommation ne
serait pas une fin en soi. Mais, pire encore : quelques-uns parmi vous douteraient
de la capacité de la science à résoudre tous nos problèmes.
Veulent-ils finir dans les flammes de la pauvreté ? Argh ! Grand Capital,
aide-nous à ramener tes enfants perdus sur le chemin de la vérité
incontestable du marché. Seigneur, délivre-les du mal.
Autres paroles hérétiques : des esprits forts soutiendraient que
le « nouveau » ne serait pas une valeur en soi, mais un fait temporel
! Quelle ineptie ! Mes enfants, tout ce qui est nouveau est bon. « C'est
nouveau, c'est bien ! » dit le Grand Capital. Répétez avec
moi : « C'est nouveau, c'est bien ! » Innovation, nouveauté,
c'est jeune, fresh, yeah ! Par contre, « c'est vieux, c'est mauvais !
» à bas le vieux, c'est ringard, dépassé. Qu'est-ce
qui est jeune ? Qu'est-ce qui est vieux ? Jouez avec moi.
La liberté d'entreprendre, la liberté des marchés ? (Le
prêtre interroge la foule à chaque question.)
Oui, c'est nouveau ! C'est formidable !
Le contrôle démocratique de l'économie par les citoyens
'
Ha, beurk. C'est mauvais. C'est ringard ! C'est vieux !
Le téléphone portable, la voiture, la télé, les
OGM, la pub, la vitesse, la compétition '
It's new ! It's good ! Ha, quelle extase !
La bicyclette, le potager, le théâtre, la lecture, la politique,
la lenteur, la convivialité '
Bahhh ! It's old, it's bad. Beurk ! Beurk !
Mes fils, mes filles, mes chers consommateurs, ne vous éloignez pas de
votre poste de télévision. Vous le regardez en moyenne 3 heures
et demie par jour. Ces derniers doutes parmi vous prouvent que ce n'est pas
encore assez. La consommation, la croissance, c'est le bonheur. Ne réfléchissez
pas, vous risqueriez de mettre la sécurité et la joie de vivre
de tous en danger. Alors, je vous en conjure, mes frères, unissons-nous
dans la foi sacrée en la science. Bénissons chaque jour le Grand
Capital.
Amen
4. Chanson
Refrain :
Gloire à toi, Grand Capital !
Gloire à toi, Grand Capital !
Sois le guide de no-os vies,
Éclaire-nous de te-es lumières.
(Bis)
Couplet 1 :
Croissance, tu es mon bonheur,
Croissance, ô oui je t'implore.
Pour toujours te sa-atisfaire,
Nous irons jusqu'à piller la terre.
(Bis)
Refrain
Couplet 2 :
Consommation, tu e-es ma joie,
Consommation, je ne peux vivre sans toi.
Pour assouvir tous mes désirs,
J'irai jusqu'à tout détruire.
(Bis)
Refrain
Couplet 3 :
La science e-est mon avenir,
Sans elle, je n'ai pas de devenir.
Ma croyance en elle est sans limite,
Je ferai tout péter très vite.
(Bis)
Refrain (Bis)
5. Prière universelle.
P : Mes très chers frères, prions ensemble.
Le prêtre lève les bras.
P+S : Je crois en un seul but, tout puissant, l'avènement du capital,
créateur de tous les biens matériels et immatériels.
En la croissance éternelle et infinie, au détriment de la vie
terrestre et de toutes les ressources qui s'y trouvent.
En un seul homme, saint Jean-Marie Messier, par qui tout a été
fait : qui, à nous les consommateurs et pour notre salut, nous a donné
les biens de la terre.
En la résolution de tous nos maux par le progrès scientifique,
et à l'avènement mondial du modèle occidental.
En la très sainte consommation qui apporte le bonheur des hommes et la
richesse de nos vies.
Je crois en l'avènement du Temple, seul et unique lieu de consommation,
et de tous les messages publicitaires donnés par lui aux hommes, pour
nous permettre d'y répandre notre joie à travers la consommation
éternelle.
6. Fraction de l'euro
Long silence. Le prêtre est assis et regarde par terre. Il se lève
lentement et s'avance vers l'hôtel.
P : Nous te supplions donc, Grand Capital, de recevoir cette offrande. Daigne
rendre cette action pleinement fructueuse, afin qu'elle devienne pour nous le
signe de la Croissance des indices boursiers. Ainsi, ton fils, saint Jean-Marie
Messier prit l'euro, le bénit, le rompit et le donna à ses disciples,
en disant : Prenez et mangez-en tous, car ceci est le corps de la terre que
nous allons piller pour vous.
Le prêtre élève l'hostie pour permettre aux fidèles
de l'adorer.
P : De même, après le conseil d'administration, prenant aussi
ce précieux calice entre ses mains riches et vénérables,
il le bénit et le donna à ses disciples en disant : Prenez et
buvez-en tous, car ceci est le calice de la sueur des hommes, la sueur de ceux
qui travaillent pour nous.
Le prêtre élève le calice pour permettre aux fidèles
de l'adorer.
P : Grand Capital, à travers ces offrandes, nous t'offrons nos vies.
Nous sacrifions 350 000 humains tous les ans sur l'autel de l'automobile afin
de satisfaire à la croissance et au progrès. Bientôt, ce
sera l'humanité tout entière qui se sacrifiera pour toi. Quand
les hommes auront détruit la planète, ils te rejoindront unis
dans le royaume du premier marché. Merci, ô Grand Capital. Saint
George Bush l'avait prédit dans son royaume : ' L'environnement ne doit
pas remettre en cause l'économie. '
P : Mes très chers frères, mes très chères soeurs,
prions ensemble.
S + P : Notre Grand Capital, qui es aux cieux, que ton idéologie soit
incontestée, que ton règne total s'accomplisse, que la volonté
du marché soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd'hui
la croissance éternelle et pardonne notre sobriété comme
nous pardonnons à ceux qui n'ont pas dépensé. Et ne nous
laisse pas succomber à la tentation de nous contenter de ce dont nous
avons besoin.
P : Mais délivre-nous du mal.
S + P : Amen
P : Délivre-nous, de grâce, Grand Capital, de tous les maux passés,
présents et à venir ; et par l'intercession de saint Jean-Pierre
Gaillard, du bienheureux et glorieux CAC 40, Dow Jones et indice Nikkei. Daigne
nous accorder l'abrutissement par une consommation sans fin et effrénée,
avec la bénédiction de saint France-Inter, saint TF1 et de tous
les médias réunis ; afin que, par le secours de ta miséricorde,
nous soyons toujours affranchis du désir d'être des humains libres
et conscients, et en sûreté au milieu de tous les fléaux
qui nous menacent : prise de conscience, liberté et volonté de
vivre pleinement. Par le même saint Jean-Marie Messier, ton Fils, qui
vit et règne, Grand Capital, avec toi, dans l'unité de la croissance,
de la consommation et du progrès.
S : Amen.
P : Que l'abrutissement par la consommation soit toujours avec vous.
S : Et avec votre absence d'esprit.
P + S : Amen.
P : Euro du Capital, qui rachètes les péchés du monde,
aie pitié de nous.
P + S : Euro du Capital, qui rachètes les péchés du monde,
donne nous des objets.
P : Grand Capital, toi qui as dit à tes apôtres : « Je vous
laisse le marché, soyez-y soumis », ne considère pas mes
péchés, mais la foi dans cette vérité ; daigne soumettre
et régner selon ton incontestable volonté. Toi qui, étant
Dieu, vis et règne pour l'éternité. Amen.
S : Amen
P : Toi-même, ô Grand Capital, nous te prions.
Grand Capital, que la réception de notre euro, que je me propose de prendre,
bien que très indigne, profite à la protection du marché
et me procure le bonheur. Toi qui vis et règne, étant Dieu, avec
notre père le Grand Capital, dans l'unité de la consommation,
dans tous les siècles des siècles. Amen.
Grand Capital, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement un indice
boursier et mes stock-options prendront de la plus-value. Que l'euro de notre
Grand Capital garde mes actions pour la consommation éternelle.
Le prêtre boit du vin de messe.
Voici l'euro du Grand Capital qui ôte les malheurs du monde. Grand Capital,
fais que la souillure de la contestation ne demeure plus en moi. Que l'euro
régénère les plus purs d'entre nous, et notamment le plus
pur des purs : Guy Sorman
P : Le Grand Capital soit avec vous.
S : Et avec votre absence d'esprit.
P : Prions
P : Nous rendons grâce au Grand Capital.
S : Et avec votre absence d'esprit.
P : Que le Grand Capital tout puissant, la sainte croissance, la sainte
consommation et le saint progrès vous bénissent.
S : Amen
Le prêtre et les fidèles distribuent l'euro.
P : La croissance soit avec vous.
S : Et avec mon absence d'esprit.
Pour un certain nombre de chrétiens authentiques, ou même simplement
d'humanistes modérés, il y a antinomie entre christianisme et
publicité. Ce fut le cas notamment de René Macaire, théologien
catholique, co-fondateur de R.A.P. Le Christ chasse les marchands du temple.
Il a la fameuse parole : « Vous ne pouvez choisir Dieu et l'argent ».
C'est dire combien la « marchandisation » du monde, et le culte
de la consommation sont aux antipodes de toute spiritualité.
De ce point de vue, deux entreprises peuvent paraître particulièrement
perverses et choquantes :
- la récupération par le système publicitaire des symboles
ou des thèmes religieux, pour mieux prendre la place du culte en en galvaudant
les « valeurs » ;
- le recours aux « techniques publicitaires » par les institutions
religieuses qui pensent ainsi « parler le langage de notre temps ».
La première entreprise apparaît dans d'innombrables campagnes,
où la célébration des produits ou de la consommation est
donnée comme le Sens même de la vie, occultant d'autant mieux toute
dimension spirituelle que celle-ci semble parfaitement récupérée
par les marchands.
La seconde est théorisée par quelques personnalités du
monde catholique, notamment par Monseigneur Foley, Président du Conseil
pontifical, qui déclarait en février 1997 : « Jésus
lui-même a fait de la publicité » et souhaitait que «
l'Église sache mieux utiliser la publicité comme un instrument
de pré-évangélisation » !...
Ces remarques doivent permettre de mieux comprendre la parodie de liturgie
publicitaire dont ont eu l'idée les animateurs de Casseurs de pub. Il
ne s'agit pas de se servir ici de la publicité pour faire la satire du
religieux en utilisant le cadre formel de la Messe, mais bien au contraire,
d'utiliser la liturgie de la Messe comme révélateur de l'entreprise
publicitaire, en ce qu'elle ne cesse fondamentalement de récupérer
le religieux, de le piller et de le dévaloriser, pour en occulter la
dimension propre, en ne laissant plus comme horizon spirituel au monde d'aujourd'hui
que le culte du veau d'or, de la gabegie des ressources planétaires,
dans un incroyable égoïsme collectif.
Célébration quotidienne de la Bourse. Culte de la croissance en
soi, au détriment des dégâts qu'elle entraîne hors
de l'Occident. Consécration de l'euro (souvenons-nous du slogan des européennes
: « Je vis en Europe, donc je pense en euro »). Pressions des marchands
pour ouvrir les jours fériés, les dimanches, (tout ce qui pourrait
donner le temps de penser et de « contempler » sans « consommer
»), et plus généralement, marchandisation de toutes les
fêtes (Noël n'est plus Noël !). « Prenez de l'avance sur
les fêtes » (achetez dès octobre). Voilà dans quel
monde de « croissance », de consumation et d'absence d'esprit les
sirènes publicitaires tentent de nous faire vivre. C'est une perpétuelle
« messe noire », si l'on peut dire.
À partir de là, le spectacle mis en scène par les Casseurs
de pub semble se justifier. La « consécration » de l'Euro
en guise de consécration eucharistique sert précisément
à faire prendre conscience aux gens du pseudo-culte dans lequel on tente
de les entraîner malgré eux (ce qui revient à défendre
le vrai culte, la vraie dimension spirituelle). Quand je lis par exemple le
simple pastiche : « Que la croissance soit avec vous - Et avec votre absence
d'esprit », je vois clairement démasqués ces faux monnayeurs
d'un paradis artificiel que sont... les publicitaires ! Il me semble que tout
prêtre authentique rirait de voir ainsi stigmatisés les suppôts
des faux cultes de notre époque.
François BRUNE
N.B. Dans Le Meilleur des Mondes,Huxley mettait déjà en scène
le culte d'un grand Être nommé Ford, à l'approche duquel
il fallait se signer (par le « signe de T », - T comme Tacot !).
Au cours de l'Office de Solidarité, les fidèles, réunis
par Douze, consommaient rituellement la nourriture idéale du régime,
le « soma », une drogue miracle chargée d'opérer la
communion de l'assemblée dans l'euphorie...
- Suite à une conférence de JL Sagot Duvauroux , et à
son livre « Pour la gratuité » :
« Le marché sait bien l'attrait qu'exerce la gratuité.
Faute de pouvoir l'anéantir, il s'efforce, en l'utilisant à ses
propres fins, de la désamorcer. La confusion qui s'instaure entre les
vraies gratuités et ces singeries contribue aussi à miner l'exigence
de responsabilité. Assaut des placards miraculeux qui offrent tout pour
rien et... pour que s'entre bâillent les porte-monnaie ! Gratuité
gadget, gratuité fantaisie qui infantilise, et mitonne ses cadeaux comme
le pêcheur à la ligne plante un asticot sur son hameçon.
»(page 71)
Et voilà que je me rends au Géant Machin où me sont proposés
cette semaine deux paquets de café plus un gratuit pour 24fr.
Comme Coluche , me voici donc passant à la caisse avec seulement mon
paquet gratuit pour remercier la caissière de son beau cadeau ... Je
vous dis pas la panique... Et le patron du magasin qui débarque comme
un fou prêt à me traiter de voleur ou de mauvais joueur.
« Le troisième paquet est gratuit si vous achetez les deux autres
! »
J'essaie alors de lui expliquer que si je dois D'ABORD payer , il ne peut plus
, ensuite, parler de « Gratuité », et qu'il emploie donc
ce mot pour faire semblant.
( Un SDF fauché ne peut absolument pas profiter de cette offre gratuite
! )
« Mais si vous divisez le prix des deux paquets par 3 , vous allez bien
voir que vous y gagnez : Payer 24 francs pour deux paquets , c'est bien plus
cher que 24 F. pour 3 paquets ».
J'essaie alors de lui expliquer qu'effectivement le paquet dit « gratuit
» m'est vendu en réalité 8fr (24 F. divisé par 3
) au lieu de 12fr (24fr divisé par deux ).
« Comment pouvez-vous dire que votre paquet est « gratuit »
si vous le vendez 8 F.? »
Là, manifestement ma question se noyait dans sa petite tête de
marchand.
Pour sortir de cette impasse je lui proposais donc de lui verser 8fr pour son
paquet , ce qui le fit bondir puisqu'il se retrouvait en rayon avec 2 paquets
manifestement orphelins d'un troisième (donc avec la difficulté
de les vendre à 12 F. pièce). Et honnêtement, sous les yeux
de sa caissière qui se marrait , il ne se sentait pas très à
l'aise de faire payer 8f quelque chose qui pour lui était bien gratuit
!
Un client, chariot plein et un peu impatient, me proposa d'aller remettre le
paquet « dit gratuit » sur le rayon et de l'attendre à la
sortie, et là, surprise. Il me faisait cadeau de son troisième
paquet de café.
C'était le premier geste vraiment gratuit que j'enregistrais dans cette
journée de la Saint Martin.
Ah! j'oubliais! Comme je préfère le thé, c'est le chômeur
qui vendait « Macadam » devant Géant machin qui a récupéré
finalement ce troisième paquet sans rien payer, évidemment !.....
Suite à l'article « Publicité médicale en Europe
» de M. Bourbon paru dans RT 20, une adhérente à écrit
au député de sa circonscription. Ce dernier a transmis la question
écrite (reproduite ci-dessous) à Bernard Kouchner
sur les risques de déréglementation de la publicité pharmaceutique.
Jean-Claude LEFORT 8 novembre 2001
QUESTION ECRITE de Jean-Claude Lefort, député de la 10ème
circonscription du Val-de-Marne, à M. Bernard Kouchner, ministre délégué
à la Santé.
M. Lefort attire l’attention de M. le ministre délégué
à la Santé sur les risques d’une déréglementation
européenne concernant la publicité pharmaceutique. La publicité
faite à l’égard des médicaments à usage humain a
été harmonisée et réglementée par la directive
européenne 92/28/CEE du 31 mars 1992. Elle interdit la publicité
faite à l’égard des médicaments délivrés
sur prescription médicale, donne des instructions précises pour
la publicité à l’égard des médicaments délivrés
sans ordonnance, détermine les conditions dans lesquelles les personnes
habilitées à prescrire ou délivrer un médicament
doivent être informées. Certains pays vont plus loin que cette
directive et interdisent la publicité des médicaments sans ordonnance.
Une proposition de règlement présentée par la Commission
européenne le 2 octobre 2001, relative aux “ promotions des ventes dans
le marché intérieur ”, envisage de lever ces restrictions qu’elle
qualifie de “ concurrence déloyale ” au sein de l’Union européenne.
Cette proposition peut choquer en soi mais elle ne semble pas concerner la France
qui se contente d’appliquer la directive de 1992. Par contre, un rapport de
la Commission sur “ l’expérience acquise dans l’application des procédures
d’octroi d’autorisation de mise sur le marché de médicaments ”,
en date du 23 octobre 2001, envisage explicitement “ d’abandonner la stricte
interdiction de publicité imposée aux médicaments délivrés
uniquement sur ordonnance ” (rapport cité, p. 23). Cette mesure est justifiée
par la demande croissante d’information du grand public pour les médicaments
et les détournements de législation offerts par Internet, ce qui
repose sur une grave confusion entre le droit à l’information des malades
et l’incitation commerciale à la consommation. M. Lefort alerte M. le
ministre de la Santé sur les dangers qui découleraient d’un assouplissement
de la publicité sur les médicaments : pressions accrues des patients
sur les médecins et dangers pour la santé, augmentation des budgets
de communication au détriment de la recherche, dérapage des dépenses
de santé pour les médicaments remboursables. Il lui demande une
position ferme de la France contre cette proposition dont l’application démontrerait,
une fois de plus, la pression des intérêts commerciaux des firmes
pharmaceutiques au détriment du droit à la santé.
Dans certaines stations de RER, des écrans diffusant des
séquences publicitaires (les mêmes que ceux déjà
présents devant la tour Montparnasse) ont été installés
en haut des escaliers mécaniques. Il ne s'agit plus ici d'affiches, fixant
une image pour l'éternité, mais de films. Les publicités
sont en mouvement et attirent le regard de chaque tirelire ambulante (puisque
c'est bien de cela qu'il s'agit, toute personne voyant ces films est un consommateur
potentiel) bloquée, donc réceptive, sur ces escaliers.
Toutes les informations que vous venez de lire sont publiques, nous vous invitons
à les transmettre à toute personne susceptible d'être intéressée
: faites circuler !.
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publication papier, adhésion, etc.) merci de prendre contact avec :
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