Mme Anne-Marie Idrac,
Présidente de la R.A.T.P.
54, quai de la Râpée
75012 Paris
Madame la Présidente,
Je me permets de vous écrire pour vous faire part de notre grande préoccupation
au sujet de l’agression publicitaire dont sont l’objet les usagers des transports
en commun, agression dont l’intensité croît continuellement malgré
le niveau de saturation atteint depuis bien longtemps sur le réseau.
Outre le contenu des messages, qui se font de plus en plus sexistes, violents,
et tendent toujours à capter l’attention du passant par des procédés
plus envahissants et abrutissants, l’on déplore une continuelle surenchère
des types de supports publicitaires et une augmentation du nombre des emplacements
eux-mêmes. Je ne citerai que quelques exemples parmi les plus frappants :
véhicules recouverts d’adhésifs (« pelliculage »)(1),
panneaux lumineux déroulants apposés à l’extérieur
de la plupart des stations sur les bouches de métro (depuis deux ans),
contremarches publicitaires, publicités au sol, publicité sur
les portillons automatiques, les portes, les murs des bouches du métro,
multiplication des dispositifs lumineux, et même, dernièrement,
apparition de la publicité sonore. Au sujet de cette dernière,
ses instigateurs n’hésitent pas, dans leur communiqué de presse,
à reconnaître leur recherche d’un média « plus
agressif » pour capter l’attention de l’usager : je vous laisse
méditer la portée morale et sociale d’une telle affirmation, qui
apporte un éclairage édifiant à l’ensemble des pratiques
de la profession depuis des décennies.
La rentabilité de ce matraquage pour l’usager n’est jamais évoquée
chiffres à l’appui, et paraît discutable. Les chiffres dont nous
disposons sont partiels ou concernent d’autres réseaux. Ils semblent
toutefois indiquer que la contribution de la publicité est extrêmement
minoritaire (de l’ordre de 2%) dans le budget des transports parisiens, surtout
si l’on déduit les investissements nécessaires à sa diffusion.
Une part de ces dispositifs consomme en outre de l’énergie, ce qui grève
probablement aussi leur rentabilité pour le réseau de transports.
Nous vous serions forts reconnaissants s’il vous était possible de porter
à notre connaissance et à celle des associations d’usagers toutes
les informations disponibles quant au rôle effectif de la publicité
dans le financement des transports parisiens. Nous vous invitons également
à étudier toute possibilité de réduire la pression
dont font l’objet les usagers, notamment par une réduction importante
du nombre des supports, par la régulation des messages diffusés,
par l’abandon des pratiques les plus discutables et l’engagement à ne
plus en introduire de nouvelles. Il nous paraît évident qu’une
telle réduction pourrait être assurée sans grande perte
financière pour la régie, puisque la contribution publicitaire
est faible, et le réseau déjà arrivé à saturation
de messages.
Je tiens à vous signaler par ailleurs que notre association ne prend
aucune part dans l’appel à « recouvrement d’affiches publicitaires »
relayé par le site « stopub.tk », conformément
aux éléments que nous avons transmis aux huissiers mandatés
par la régie « Métrobus ». En revanche,
notre mouvement, fondé en 1992 et qui représente 800 adhérents,
considère de son devoir d’informer le plus largement possible nos concitoyens
sur les problèmes que pose la publicité et sur les formes de résistance
qu’ils suscitent.
Nous soutenons que ces actions d’usagers sont le reflet d’une exaspération
générale envers la publicité sur votre réseau de
transports et ailleurs, et nous comprenons tout à fait le sentiment d’impuissance
que peuvent ressentir les usagers face au rouleau compresseur publicitaire.
Conformément à l’objet de notre association, nous avons donc engagé
des actions légales pour répondre à ce mal-être des
usagers : une lettre-type à votre attention leur est proposée
sur notre site internet, ainsi que des liens vers les responsables de vos lignes.
D’autres initiatives pourront suivre en fonction du degré de votre empressement
pour satisfaire à la juste revendication de réduction de la publicité
dans le métro.
Je me tiens bien entendu à votre entière disposition pour approfondir
ces questions, entendre vos remarques, discuter des modalités ou vous
soumettre des propositions plus détaillées pour libérer
la RATP et ses usagers des abus de la publicité.
Je vous prie de recevoir, Madame la Présidente, l'expression de ma grande
considération.
Thomas Guéret
Président de R.A.P.
Copie à :
- M. le ministère des Transports
- M. le ministre de la Culture et de la Communication
- M. le Maire de Paris
- M. le Président de la Région Île de France
- FNAUT
(1)Le « pelliculage » des autobus de ligne était
apparu en 1998 lors de la coupe du monde de balle au pied et avait fait l’objet
d’une forte mobilisation de notre mouvement (carte-pétition au ministre
des Transports, courrier à votre prédécesseur, actions
non-violentes dans les voitures concernées, etc.).
Voir la lettre sur notre site internet : ici