R.A.P.

La révolte des boîtes aux lettres



par Jean-Christophe Vandevelde

La mobilisation de R.A.P. sur le front des prospectus : état des lieux

R.A.P. est actif depuis 1994 pour obtenir une loi qui permette de se protéger des prospectus lorsqu'on ne désire pas en recevoir. Les prospectus qui inondent quotidiennement nos boîtes aux lettres sont une insulte à notre liberté, à notre intimité et source importante de pollution et de gaspillage. Par ailleurs, ces « 40 kg de prospectus par foyer et par an » sont payés entièrement par nous, citoyens, au travers de nos achats, les coûts de publicité étant répercutés sur ceux des produits. En outre, les coûts de traitements des déchets résultant de la publicité sont réglés par voie fiscale (taxes locales) et pèsent, pour partie, sur le budget des ménages. Dans ce contexte et en collaboration avec d'autres associations, RAP demande, en plus d'un autocollant réellement efficace, que les producteurs de prospectus prennent intégralement en charge le coût de traitement des déchets engendrés et qu'un plan de réduction des déchets à la source soit enfin mis en place.
Pour obtenir gain de cause, plusieurs actions ont été lancées : la Révolte des BAL (1) (voir RAP échos n°7 et RAP échos n°8), Ras les boîtes (voir RAP échos n°10), la pétition "Pas de publicité dans ma boîte aux lettres", le procès d’Yvan Gradis contre un distributeur (voir RAP à Toile n°1), l'opération Boîtes jaunes et les Journées de déversement, sans oublier les différentes initiatives auprès des responsables politiques.

Aujourd'hui, le résultat de notre action est en demi-teinte. Deux initiatives ont été prises par les pouvoirs publics. On peut les considérer comme des avancées mais elles ne sont pas du tout satisfaisantes.
Depuis juin 2004, le Ministère de l'écologie et du développement durable met à disposition des particuliers un autocollant « stop pub », distribué via les collectivités locales. Malheureusement, rien n'oblige les distributeurs à respecter cet autocollant. Pour preuve, l'enquête de l'ADEME réalisée en octobre dernier montre que la moitié des personnes interrogées estime que l'autocollant n'a permis de stopper que partiellement la réception de prospectus.
Le second dispositif concerne la mise à contribution, symbolique, des entreprises de distribution au coût d'élimination des prospectus. Il s'agit d’une loi de finance rectificative (2) qui instaure une contribution au traitement des déchets issus de distribution gratuite d'imprimés non sollicités. Elle ne concerne toutefois pas les imprimés du type « journaux gratuits », en effet, l'article 23 de la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales a exclu du dispositif les publications de presse, c'est-à-dire principalement les journaux gratuits.
Un décret d'application du 2 mars 2006 vient de préciser certaines des modalités d’application de ce dispositif. Ainsi, la contribution pourra être financière ou en nature et sera gérée par un organisme ad hoc dont la mise en place est à la charge des industriels de la filière. Bien que le montant de la contribution financière soit fixé par un autre décret, à paraître ultérieurement, on peut d’ores et déjà penser qu’elle sera trop indulgente. En effet, les entreprises ne doivent pas simplement contribuer mais payer le coût intégral du traitement des prospectus. Il faut même que la contribution soit suffisamment élevée pour être dissuasive et ne plus apparaître comme un droit à polluer. Exemple probant, le dispositif Eco-Emballages n'a eu aucun effet réducteur sur la production des déchets d'emballages et se contente d'atteindre les objectifs minimaux en matière de recyclage. Cette situation d'échec s'explique par la faible implication financière des producteurs, qui, ne prenant en charge que 43 % des coûts de gestion, laissent le solde à la charge des collectivités. C'est donc le contribuable qui assume la majorité des coûts liés au traitement des déchets d'emballages et ce schéma risque bien de se reproduire pour les prospectus.
Quant à la possibilité pour les distributeurs de contribuer « en nature », cela signifie concrètement que l'on verra fleurir, sur les prospectus, des encarts publicitaires en faveur du traitement des prospectus !

Voilà donc où nous en sommes actuellement. La lutte contre les prospectus est combat de longue haleine et les pressions des professionnels pour que rien ne change sont énormes. N'oublions pas que les revenus de La Poste, via sa filiale Médiapost, proviennent principalement des distributions publicitaires !
Continuons à nous mobiliser, et à faire pression sur les pouvoirs publics. Multiplions les Journées de déversement, partout en France, avec des associations ou des groupes locaux. Ces actions, relayées par les médias et opposées aux gestionnaires, deviendrons -espérons-le- un levier libérateur ouvrant prochainement sur de bonnes décisions.
Dans cette optique, R.A.P. et le CNIID (Centre national d'information indépendante sur les déchets), notre partenaire pour cette action, ont réalisé un courrier-type que chacun est invité à envoyer à son ou sa député dans le but de l'alerter sur la situation. Ce courrier est téléchargeable sur les sites Internet des deux associations. (ici pour RAP)
La révolte des boîtes aux lettres continue ! ¦

1. BAL : boîtes aux lettres, évidemment !
2. Il s'agit de la loi de finance rectificative n°2003-1312 du 31 décembre 2003, JORF 31 décembre 2003, qui introduit l'article L 541-10-1 dans le code de l'environnement.

Télécharger le Texte au format Pdf